ENTREZ DANS LA FOLIE
Par OG SoulJA Loc
LD Dorsey IV  -#999359
Couloir de la Mort Texas
" Entrez avec prudence ".

Vous pénétrez dans le miasme, le chaos et l'endroit que la prudence m'a prouvée qu'il était préférable de cacherŠ Un endroit où chacun possède, au milieu du bien et du mal, la joie, la douleur, les souvenirs et les idées, évoluant régulièrement, changeant, illuminant aussi, mais là où les ténèbres dominent les tréfonds.

Entrez dans l'esprit d'un homme, meurtrier, qui ne vit que pour mourir ! Survivant dans le couloir de la mort du TexasŠ

J'ai 26 ans. Je connais la peur, elle est présente ici même cachée, avoir peur c'est être faible.

Je connais la lâcheté, le courage, la résolution, la souffrance, la cruauté, la douleur et la camaraderie. Je suis aussi un homme qui connaît la mort ! Génial, non ? La plupart des gens de 26 ans pensent qu'ils vont vivre à jamais, je n'ai plus cette illusion, nous la perdons tous au fil du temps. Mais normalement, cela se déroule sur plusieurs années, j'ai l'impression que je l'ai perdu d'un seul coup, en l'espace de quelques secondes. Témoin à l'âge de 11 ans de la destruction infligée par les balles d'une arme à feu, je suis alors passé de l'enfance à l'âge adulte pour devenir prématurément vieux. Je connais la mort, ici j'y suis confronté quotidiennement, au sein de la famille des condamnés à mort, forcé de vivre entre nous, de voir dans nos yeux le reflet de nos folies infinies, de la haine et de la colère, pour y voir même la solitude et la tristesse qui prédominent dans nos rages.

Dans les limites implacables posées autour de notre survie, la plupart d'entre nous sont des créatures très particulières, des corps jeunes habités par des esprits vieux.

Mais je fulmine pour tenter d'exposer l'ambivalence de notre réalité et de nos condamnations mutuelles. Mélange de joie et de douleur. Ici, notre désir de vivre (chez certains) est élevé en proportion de notre proximité avec la mort. Alors je sens, nous ressentons une euphorie aussi intense que notre crainte collective, notre haine et notre consternation. Nous sommes tous proches, notre intimité naît de notre suppression collective et de notre rendez-vous avec la machine de mort du Texas. Une communion entre hommes, la nôtre est comme un groupe qui ne peut pas être rompue par les mots, l'ennui ou le divorce, pas même par le grand " je ". Nous vivons à travers les histoires de nos exploits, dans les c¦urs et les esprits de ceux que nous aimons et de nos camarades.

Un dévouement simple, désintéressé, le sentiment d'appartenir les uns aux autres. C'est sans doute l'élément de décence le plus tangible que j'ai découvert dans le conflit qui m'oppose à l'État. Nous sommes groupés et unifiés avec des meurtriers éventuels, partageant nos dangers quotidiens, nos peurs, la laideur de notre incarcération et le sordide de nos existences.  Parce que ce n'est pas la vie. La dégradation de se voir mutuellement anticiper cette longue marche vers notre propre mort, notre impatience et notre incapacité d'éviter notre sentence de mort, tout cela nous rapproche. Une camaraderie, une affirmation partielle de la vie est une manière de préserver un vestige d'humanité, ce qui est fou quand on considère que la majorité d'entre nous sont ici pour des crimes sauvages. J'ai aussi trouvé étrange que ma sentence de mort me pousse si souvent à me réfugier dans une violence sociopathique.  Alors dire qu'un homme qui n'a rien, n'a plus rien à perdre, cela fait peur, parce que je manque de raisons valables pour me restreindre et freiner mon inclination naturelle à détruire sans hésitation ou sans remord et ce, quel que soit le risque potentiel pour ma propre vie. La nature même du système crée de nombreux ennemis qui, par la nature de leur travail, deviennent mes adversaires en alourdissant encore les actes de mauvais traitements commis par les oppresseurs qui sont aussi des criminels. Mais qui et où que nous soyons, quelle que soit la nature de mes actions passées, peut faire de moi autre chose qu'un homme. Je suis très familier du diable qui vit en moi, ça et les circonstances qui me force à exister dans un acharnement continuel, nos oppresseurs ne montrent jamais, ou très rarement, un signe de compassion ou de pardon ; et avec mon passé, je n'attends aucun geste et je perds toute prédisposition à arrêter. Ce que l'état du Texas a établi dans mon dossier concernant mon mépris pour la vie et ma prédilection pour la violence est en train de se réaliser. Est-ce que ma sentence de mort m'aurait rendu pire ? Aucune raison de se conformer, aucune motivation. De toutes façons, je suis voué à la mort !

Pour aborder les conditions ici, je ne suis pas quelqu'un à accepter passivement ce que les circonstances m'imposent. Pendant cette dernière année, je me suis efforcé d'accepter et  d'endurer ce harcèlement ininterrompu et les privations quotidiennes. Je pense, en tant qu'homme, que d'en parler maintenant est sans intérêt. L'administration a besoin de démonstration. Je ne soutiens pas les protestations car elles signifient que je pourrais changer quelque chose. Nos protestations collectives ont influencé quelques évènements jusqu'à un certain degré, au prix du sang et des ecchymoses. Il semble que nos oppresseurs dépassent la violence ce qui explique leur propre force insurmontable, une équipe d'intervention composée de cinq hommes, des produits chimiques (gaz) et les privations sensorielles. Le TDCJ a réponse à tout. Mais devinezŠ Ca ne marche pas ! Les autochtones sont en ébullition. Nos objections n'ont pas abouti à grand chose, voir à rien. Devons nous augmenter la mise pour être traités avec décence ?  Ma rhétorique ne ressuscitera pas ceux qui sont morts avant moi ou ceux qui mourront après moi. Tout ce que je peux faire c'est encourager à ne pas mourir passivement, même au prix d'autres morts.

Vous pouvez aider à briser ce cercle de violence. Prenez position. Contacter les dirigeants du TDCJ, des organisations officielles. Sinon notre groupe à l'intérieur finira par exploser et bien que nous ne soyons pas très nombreux, nous sommes encore quelques-uns. Faites arrêter tout cela avant que l'irréparable ne survienne.

Ceci étant dit, je m'en vais comme je suis venu.

Celer silense and mortalis
Casper

Sincèrement,

Leon Dorsey
 

Traduction par S. Ageorges

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